Le Sacre du
printemps
est
un ballet chorégraphié en 1913 par Vaslaw
Nijinski
sur
une musique composée par Igor Stravinsky. L’argument imaginé
par le compositeur est le suivant : pour célébrer l’arrivée du printemps,
un groupe de jeunes filles vierges exécute des danses sacrées. La cérémonie consiste
à désigner l’une d’elle en vue de la sacrifier et bénir ainsi la terre
nourricière. « L’Élue » débute alors une danse frénétique jusqu’à
mourir d’épuisement. Bien qu’on ne compte désormais plus les reprises de ce
spectacle par d’innombrables chorégraphes, l’œuvre la plus célèbre de Nijinski
rencontre pourtant à sa création l’hostilité du public et provoque un charivari
tel dans la salle du Théâtre des Champs-Élysées
que le ballet disparaît de l’affiche après seulement huit représentations.
À l’époque, le ballet fait scandale. D’une part, la partition de Stravinsky opère un bouleversement esthétique radical. Pour donner un caractère primitif à son morceau, le compositeur assemble des éléments musicaux hétéroclites, ce qui produit, sur le public de 1913, un effet acoustique inhabituel : superposition d’harmonies, mélodies contrastées, timbres bruts, rythmique irrégulière… D’autre part, la violence des pas de danse réalisés offusque une grande partie de la salle. Nijinski impose aux danseurs une chorégraphie qui rompt avec l’harmonie convenue de la danse classique : les mains sont crochues, les corps tordus, les membres dissociés, les articulations anguleuses, « Les positions, traditionnellement en dehors, se tournent vers l’en dedans, les sauts s’aplatissent pour renforcer l’atmosphère pesante et la difficulté à s’arracher à sa condition (…) Les mouvements d’ensemble jouent sur des asymétries » (Marie-Claude Pietragalla, La Légende de la danse, Paris : Flammarion, 1999, chapitre « Nijinski ou l’avant-garde maudite », p. 130).
La version du Sacre du Printemps de Nijinski (1913)
reconstituée par Millicent Hodson en 1987 avec le Joffrey Ballet
Solo de l'Élue interprété par Marie-Claude Pietragalla :
« Il est vrai que l’essence même de la danse sert d’argument à la pièce, à savoir son origine rituelle et parfois sacrificielle : cela peut expliquer l’attirance naturelle des chorégraphes pour cette œuvre-clé, au-delà de la rupture entre classicisme et modernité qui la caractérise » (Fabienne Arvers, programme du vidéodanse du Centre Georges Pompidou, janvier-février 2001, p. 23).
La multitude des relectures et autres ré-appropriations du Sacre du printemps par tant de chorégraphes atteste l’importance de cette œuvre magistrale. Presque 50 ans après Nijinski, Maurice Béjart propose, en 1959, sa propre version. Elle se caractérise par l’insertion d’un Élu masculin. Sa chorégraphie souligne ainsi un affrontement des sexes : les hommes agressifs et puissants s’opposent aux femmes craintives, « cette dualité à la fois antagoniste et complémentaire trouvant l’équilibre idéal dans l’union du couple » (Dictionnaire de la danse, Larousse, 1999, p. 632).
Le Sacre du printemps, revu et corrigé par Maurice Béjart en 1959
Duo final qui célèbre "l'union du couple" :
En 1975, dans la version de Pina Bausch, le sol est recouvert de tourbe. Les
hommes sont torses nus et en pantalons noirs, les femmes en combinaisons
blanches, la danse est convulsive, les
mouvements se répètent de manière obsessionnelle.
« De mains en mains circule nerveusement une étoffe rouge sang dont l’ultime détentrice sera l’Élue. (…)
Les corps en sueur sont de plus en plus maculé
[de terre], comme si s’inscrivaient sur chacun les stigmates
du supplice qui attend l’Élue
dont tout le groupe se fait complice »
(Dictionnaire de la danse, op. cit., p. 633).
Le Sacre du printemps, version Pina Bausch (1975)
Solo final de l'Élue interprété par Malou Airaudo :
À
voir :
Les
Printemps du Sacre :
documentaire réalisé par Jacques Malaterre, avec des extraits des chorégraphies
de Vaslaw Nijinski, Léonide Massine, Mary Wigman, Martha Graham, Mats Ek,
Maurice Béjart et Pina Bausch (La Sept, 1993).
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