Le travail de Victor Quijada à Montréal fusionne littéralement
les techniques du ballet classique, de la danse contemporaine et des danses urbaines afin de composer un style hybride. Ces mixtures et métissages font éclater
les formes et codes de la danse pour créer une nouvelle écriture chorégraphique.
Slicing Static de Victor Quijada
Le style chorégraphique hybride de Victor Quijada se nourrit d’une
formation triadique composée à la fois du hip hop, de la danse contemporaine et
du ballet classique. Initié très jeune aux techniques de break
dance, Victor Quijada a suivi l’enseignement
classique et contemporain de Rudy Perez à Los Angeles, puis a travaillé avec la
Twyla Tharp Dance Company à New York et les Grands Ballets Canadiens à
Montréal. Avec son collectif le Rubberbandance Group créé en 2002, il
s’entoure d’interprètes aux horizons variés afin de développer une écriture
chorégraphique singulière et fusionnelle. Depuis sa création, le collectif est
composé des danseurs Jayko Eloï, breakeur
autodidacte, et Anne Plamondon
qui, issue des Grands Ballets Canadiens, a dépassé les frontières du ballet
classique en interprétant des œuvres de Jiri Kylian, Ohad Naharin, Rui Horta et
Angelin Preljocaj notamment pour le Gulbenkian Ballet au Portugal.
Victor Quijada et Anne Plamondon | Rubberbandance Group |
Pour la création de Slicing Static, les rejoignent Emmanuelle Le Phan, danseuse de hip hop membre du collectif féminin montréalais Solid State et formée en danse moderne et contemporaine à l’Université Concordia, ainsi que Kevin Turner diplômé de la Northern School of Contemporary Dance à Leeds en Angleterre.
Le Rubberbandance Group se présente ainsi comme un espace expérimental de création chorégraphique où chaque interprète est invité à développer son propre langage tout en le confrontant aux techniques des autres dans une dynamique d’échange et de création.
Poids
La gestion du poids du corps constitue un élément fondamental dans le travail chorégraphique de Victor Quijada. Entre danse moderne et boxe, Jayko Eloï semble mener un combat face aux contraintes de l’espace et de la pesanteur. Ses jeux de pieds insolites librement inspirés du break dance narguent le sol et ses acrobaties défient la loi de la gravité. L’extrême mobilité des appuis au sol interdisent la fixation d’une figure. Mus par une force centrifuge, les sauts perturbent la position. L’étirement des membres menace constamment le point d’équilibre. Les torsions des corps brisent la ligne et l’axe vertical. Le centre de gravité à la fois allégé et multiple, diffus et mouvant, permet aux danseurs de se déplacer avec une rapidité déconcertante et une précision époustouflante. La répartition du poids sur les quatre membres et la tête donne aux déplacements un caractère animal.
Anne Plamondon and Joe Danny Aurelien | Crédit Photo : Chris Randle |
La figure du duo se compose à partir d’éléments tirés à la fois de la capoiera et du contact improvisation. Le contact s’établit entre le pied de l’un et la main de l’autre. Le vertical et l’horizontal se confondent dans un imbroglio de plans perpendiculaires qui se superposent et s’inversent : l’un debout sur ses jambes, l’autre en équilibre sur la tête. Organique, le bras fait office de troisième jambe, tout comme l’appui de la tête dans certaines figures renversées. La main évolue comme un pied et le pied s’offre comme une main. Le partenaire devient un prolongement du corps. Chacun s’accommode du poids de l’autre pour jouer avec et modifier ses propres appuis. Une grisante sensation d’apesanteur émane des portés. Débarrassés du poids pris en charge par un partenaire, les gestes s’allongent et s’étirent dans une sensation d’étrange légèreté.
Renversement des plans
Outre le mélange des plans, les danseurs s’échappent régulièrement de l’espace central réservé traditionnellement au spectacle afin d’occuper les lieux environnants et offrir au public un point de vue différent. L’espace de la représentation est ainsi élargi : rompant avec la distance conventionnelle, il crée un rapport de proximité avec le spectateur. Le public entoure la scène mais le mouvement et l’action se développe et se déroule « tout autour des personnes qui les regardent » (notes au programme, Usine C, septembre 2004), annulant ainsi tout rapport frontal. Le spectateur est amené à regarder non seulement sur le plateau, mais aussi dans les allées, entre les sièges et à l’étage.
Sous les gradins, Emmanuelle Le Phan évolue avec souplesse dans un
plan renversé. Tel un insecte, elle se déplace sur les mains et les pieds
accrochés à l’échafaudage. En équilibre, son corps s’enroule autour des barres
de fer, se cambre et se renverse. Dans un jeu de lumière, les ombres des
poutres métalliques se multiplient donnant à la structure d’acier l’aspect
d’une toile d’araignée. Tout au long du spectacle, le créateur des lumières Yan Lee Chan remplit le défi d’éclairer le
hors scène. Les points de focalisation ainsi démultipliés se répercutent à la
fois dans le corps et dans l’espace, contraignant le public à se retourner ou à
se pencher pour voir, à se tordre le cou pour regarder. La figure de la torsion
d’ailleurs très présente dans la chorégraphie de Victor Quijada s’immisce alors
jusque dans le corps retourné du spectateur.
Slicing Static par le
Rubberbandance Group
Présenté du 21 au 25 septembre 2004 à l’Usine C de Montréal
Chorégraphie : Victor Quijada
Interprétation : Jayko Eloï, Emmanuelle Le Phan, Anne Plamondon, Victor Quijada, Kevin Turner
Musique originale : Mitchell Akiyama
Dramaturge : Miko Sobreira
Création lumière : Yan Lee Chan
Site Internet : http://www.rubberbandancegroup.com
Présenté du 21 au 25 septembre 2004 à l’Usine C de Montréal
Chorégraphie : Victor Quijada
Interprétation : Jayko Eloï, Emmanuelle Le Phan, Anne Plamondon, Victor Quijada, Kevin Turner
Musique originale : Mitchell Akiyama
Dramaturge : Miko Sobreira
Création lumière : Yan Lee Chan
Site Internet : http://www.rubberbandancegroup.com
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