samedi 15 juillet 2000

Inclassable Blanca Li

À la fois chorégraphe, gymnaste, flamenca, actrice, danseuse, acrobate, chanteuse et humoriste, Blanca Li a plus d'une corde à son arc, plus d'un tour dans son sac. Elle monte les chorégraphies pour des films tels que Gazon Maudit ou Nettoyage à sec et a tenu l'affiche tout l’hiver au Théâtre National de Chaillot pour un « one woman show » intitulé Zap! Zap! Zap! Dans ce spectacle écrit par Christophe Alévêque, elle incarnait tour à tour divers personnages : numéros d'acrobatie suspendue par des tissus, démonstrations de danses traditionnelles (Bretagne, Andalousie), variations de GRS, satires de la variété, solo de pointes classiques, parodie de danse contemporaine, caricature de cantatrice...


Pour le festival Paris Quartier d'été, elle recrée Nana et Lila. Ce spectacle l'avait révélé en France en 1993 au Festival Off d'Avignon. Dans cette pièce, la chorégraphe Andalouse propose un flamenco moderne, épuré du pittoresque et remanié par une écriture qui nous emmène dans un univers poétique particulier à l'esthétique contemporaine. Dynamique et énergique, la danse de Blanca Li est marquée par l’Espagne. Non pas une Espagne de carte postale, réduite aux castagnettes et à la paella, mais une Espagne actuelle et vivante. Pour ce spectacle, Blanca Li s'inspire également des danses marocaines (les « Lilas » sont des nuits cérémonielles de transe). Cinq musiciens marocains accompagnent sur scène les danseuses au son du sintir, des crotales, du chant et du tambour. Leur groupe, Gnawa Halwa, a enregistré un CD en 1993 intitulé : Rhabaouine. La chorégraphe mêle ainsi le folklore andalou, aux racines gitanes et orientales, avec la musique « Gnawa » (dont l'origine mythique se situe au Soudan et au Mali et qui se pratique au Maroc, en particulier à Marrakech).

Tant au niveau musical qu’au niveau chorégraphique, Nana et Lila confronte la maîtrise, la concentration et la retenue très intérieure, très dure du flamenco, avec l'explosion des transes, incontrôlables et jaillissantes. D’ailleurs, pour Blanca Li, les scènes de transes résonnent étrangement avec le flamenco : « C'était le même épanchement spontané et massif d'énergie émotionnelle accumulée que j'avais vécu sur scène en dansant le flamenco, mais dans un contexte totalement différent. (…) Les gitans, en étroite et fortuite collaboration avec les morisques, ont été les artisans de cette transmutation des fonds orientaux et juifs dans le flamenco » (Blanca Li, plaquette du spectacle Nana et Lila). 

Nana et Lila, du mercredi 2 au vendredi 4 août 2000 à 22 heures,
Cour d’Orléans, métro Palais-Royal.


Chorégraphie de Blanca Li pour le clip de Daft Punk "Around the World" :


Site internet : www.blancali.com

Decouflé le touche à tout

Adepte de cirque, de théâtre, de danse et de cinéma, Philippe Decouflé a été invité à investir le Jardin des Tuileries. Après avoir chorégraphié de nombreux spots publicitaires, notamment Perrier, Polaroïd, ainsi que la campagne publicitaire pour la nouvelle numérotation à dix chiffres de France Telecom en 1996, des millions de téléspectateurs ont découvert, cet hiver, ses créatures encadrer les pauses publicitaires pour les jingles de France Télévision. Minutieux maître de ballet, metteur en scène maniaque à la rigueur mathématique, Philippe Decouflé s’ingénie à inventer des machineries abracadabrantes : poulies, chausses trappes, trompes l’œil et systèmes élastiques ébranlent la vision du spectateur, dérouté, émerveillé, embarqué dans un univers burlesque, surréaliste et onirique.

Pour Triton, comme pour la cérémonie des Jeux Olympiques d’hiver en 1992 à Albertville (Savoie), Philippe Decouflé convoque sur scène tous les arts du cirque et les associe au théâtre et à la danse. Les saynètes se succèdent pour donner des numéros aux références décalées, parodiques et humoristiques. Chacun son tour vient livrer son histoire, se raconter, suivant sa personnalité propre. Ce spectacle, créé en 1990 pour le Festival d'Avignon, a voyagé dans le monde entier, notamment lors d’une grande tournée de quatre mois en Amérique latine.

Une deuxième version avait été recréée en 1998 à Saint-Denis pour accueillir la coupe du monde de football. Cette deuxième version réunissait une nouvelle équipe d'interprètes et s’était enrichie des Petites Tritures : des attractions, inspirées de l'esprit des fêtes foraines, qui se déroulaient à l'extérieur, tout autour du chapiteau, une heure avant et après la représentation. La nouvelle adaptation, Triton 2 ter, est à découvrir aux Jardins des Tuileries : « Triton est un satellite de Neptune. C'est la seule planète du système solaire qui tourne à l'envers (...). Triton est également un grand mollusque gastéropode. Triton est en outre le noyau de l'atome de Tritium » (Philippe Decouflé, texte de présentation pour Triton 2 ter, site internet de la compagnie DCA).
Triton 2 Ter
spectacle de la compagnie DCA mis en scène par Philippe Decouflé
du 18 juillet au 5 août à 22 h
- Métro Concorde ou Tuileries - Plein air 

Vidéo du Petit Bal Perdu
chorégraphié par Philippe Decouflé

Interprètes : Philippe Decouflé et Pascal Houbin





Le site de la compagnie « Decouflé & Complices Associés » :

dimanche 2 juillet 2000

L'été parisien : sous les pavés, la plage...

Alors que l’été les festivals attirent les foules sur les côtes – jazz à Juan-les-Pins et à Marciac, art lyrique à Aix-en-Provence, musique et danse à Montpellier et à Marseille, théâtre en Avignon –, Paris fut longtemps réputée pour demeurer vide pendant les deux mois d’été. La plus belle ville du monde devenait ainsi chaque année un désert particulièrement aride : théâtres fermés, la culture hibernait. En effet, quel intérêt de s’enfermer en plein mois d’août dans des salles cloisonnées, rarement équipées de la climatisation ? Le festival « Paris Quartier d’été », organisé à l’initiative du Ministère de la Culture en 1990, a ainsi entrepris un projet périlleux.

Les dix ans du festival Paris Quartier d’été
Depuis désormais dix ans, la capitale vibre et les festivaliers découvrent certains quartiers méconnus. Des scènes installées en plein air parsèment les jardins, parcs et lieux mythiques de la ville : Vincennes, le Centre Georges Pompidou, le Jardin des Tuileries, l’Opéra Garnier, le Jardin du Luxembourg, le Palais-Royal… Tous ces espaces sont investis au service du spectacle et de l’été. Se balader entre les colonnes de Buren éclairées par le clair de lune, gambader la nuit au parc de la Villette, veiller jusqu’à l’aube sous la grande Arche de la Défense sont autant d’occasions de découvrir Paris sous un autre jour, autant de facettes inexplorées de la ville. Cinéma, concerts, théâtre, conte, danse et musées se partagent le beau rôle pour s’ouvrir à un public le plus large grâce à la gratuité ou aux tarifs exceptionnels. Par ailleurs, le cinéma en plein air de la Villette se met en place dès 1992 grâce à l’initiative du festival Paris Quartier d’été.

Depuis la naissance de cette entreprise, le festival attire de plus en plus de spectateurs, mais également, de plus en plus d’artistes. Au bout de trois ans, 50 000 personnes assistaient sous l’Arche de la Défense au Requiem de Verdi interprété par l’Orchestre de Paris et les Churs de Riga. L’année d’après, en 1994, le parvis de la Défense comptait 70 000 spectateurs. Au final, 110 000 spectateurs comptés en 1996 et 125 000 recensés en 1999 (Chiffres recueillis sur le site de « Paris Quartier d’été »). 

Le choix des artistes et des spectacles se caractérise par l’éclectisme : d’Yvette Horner à la Mano Negra en 1991, des danses berbères au butoh (Kazuo Ohno dans les jardins du Palais-Royal en 1994), de la danse classique avec les Ballets de Monte Carlo en 1996 à la « nouvelle danse » de Philippe Decouflé en 2000, en passant par la danse contemporaine avec Merce Cunningham en 1995 et la danse hip hop avec Käfig en 1999, des Marionnettes sur eau du Vietnam en 1996 aux concerts d’orgue en 2000. 

Philippe Decouflé et Blanca Li sont deux chorégraphes contemporains invités pour le Festival Paris Quartier d’été. Bien qu’ayant suivi des formations rigoureuses (Alwin Nikolaïs et Merce Cunningham pour l’un, Martha Graham et Alvin Ailey pour l’autre), ils possèdent néanmoins le goût de sortir des cadres, de confronter leur pratique aux autres techniques et, enfin, de surprendre le public en se lançant toujours dans de nouvelles aventures. Tous deux, en effet, ne se contentent pas de monter des spectacles mais investissent également le cinéma, le café-théâtre, les cérémonies officielles, la télévision, les défilés… Deux de leurs premières créations (présentées au Festival d'Avignon en 1990 pour Philippe Decouflé et 1993 pour Blanca Li, et spécialement réadaptées pour l’occasion) sont à (re)découvrir cette année au Festival Paris Quartier d'été. 

D’autres spectacles sont à découvrir à travers la ville, ainsi que de nombreux concerts, de l’opéra, du théâtre, des contes et du cinéma.

Site internet : www.quartierdete.com